Promouvoir la pensée infirmière
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Nous sommes huit infirmiers spécialistes cliniques, avec des modes d'exercices et des disciplines différents, mais réunis par une même vision du soin et une même volonté: valoriser la clinique infirmière.
13/11/2020
Deuxième article de Rémi Izoulet sur le thème du «care» selon Jean Oury, ancré dans le courant de la psychothérapie institutionnelle.
Jean Oury fait partie des théoriciens du courant de la psychothérapie institutionnelle. La théorisation et la pratique de l’accompagnement quotidien du patient en institution psychiatrique sont considérées comme fondamentales pour la discipline.
Jean Oury part du postulat que le patient va rejouer dans la vie quotidienne une symptomatologie qui, à l’extérieur de la structure, rencontre des réponses relationnelles non apaisantes voire pathogènes. Le travail qui doit être engagé par les soignants doit donc être de tout mettre en œuvre pour que la présence du soignant soit la moins nocive possible pour le patient.
En effet, sans une réflexion permanente sur nos modalités relationnelles instinctuelles, nous risquons d’être nocifs pour les patients que nous rencontrons. Les soignants peuvent par exemple reproduire des modes relationnels qui risqueraient de potentialiser leurs symptômes.
Les patients en psychiatrie sont pris en soin en partie parce que leur symptomatologie les empêche de vivre dans un milieu extérieur où les réponses relationnelles des individus sont la norme.
Établir une relation individuelle structurante, apaisante et sécurisante dans le cadre d’un accompagnement quotidien est une véritable démarche de soin. Cette relation doit prendre en compte les différents enjeux psychopathologiques ainsi que la dimension subjective inhérente à chaque l’individu. Ici se matérialise le concept du « care ».
L’infirmier doit donc s’affairer à créer des liens, avec ces patients en proie à des pathologies psychiques enfermantes. Il le fait par le biais d’une parole ou d’un geste ; par un échange sur un centre d’intérêt commun ou par le témoignage d’une certaine empathie ; par le partage d’un soutien ainsi que par la croyance dans des possibilités de changement.
Ces temps de partage favorisent la création d’une relation thérapeutique nécessaire à tout engagement du processus soignant par le patient. Ils permettent à ce dernier d’arpenter son propre chemin, étayé par les professionnels qui l’entourent. Bien sûr, cela n’a rien à voir avec de la séduction, de la compassion béate ou de la démagogie.
Jean Oury défend ardemment l’idée que les professionnels paramédicaux ne doivent pas sous-estimer l’importance de la vie quotidienne, de ces espaces interstitiels qui lient les temps formels et structurent la journée. Ces espaces recélant selon lui une myriade de petits détails qui participent à la construction de l’ambiance du service.
Or certains patients atteints de pathologies comme des troubles psychotiques ou des troubles de personnalité paranoïaques sont, pour différentes raisons, très sensibles aux petits détails de l’environnement. Ils vont également être très sensibles à l’ambiance du service et c’est pour cela qu’il est important d’y porter une attention particulière.
Discussion
Jean Oury précise que la relation doit être assez flexible pour s’adapter aux différentes modalités relationnelles rencontrées. Cette souplesse permettra une capacité d’ajustement permanente dans la relation, ce qui pourra empêcher ou tout au moins atténuer l’instauration de modalités relationnelles pathogènes entre les soignants et les patients qu’ils accompagnent.
Dans son effort de théorisation du travail de l’accompagnement de la vie quotidienne, Jean Oury met le patient au centre de la prise en soin. Il développe l’importance pour le patient de la relation à autrui et ce de façon générale. Il dépasse le cadre de la relation « soignant-soigné » pour travailler sur toute la constellation transférentielle qui entoure le patient.
Jean Oury porte également un fort intérêt sur ces espaces interstitiels, cette ambiance relationnelle qui borde et affecte tous les individus de la structure, eux-mêmes participants à la coloration de cette ambiance. Cette pensée générale de la relation et cette volonté de soutenir le fonctionnement global du patient évoque le concept de « care ».
Pour aller plus loin, nous vous recommandons l’ouvrage de Jean Oury « Psychiatrie et psychothérapie institutionnelle » aux éditions « Champs social ».
Rémi Izoulet
Infirmier Spécialiste Clinique
Nous écrire: collectif.helianthe@gmail.com